lundi 22 avril 2024

Les pratiques du passé...



La semaine dernière, j'ai écrit un éditorial à propos de l’incontournable présence du numérique en éducation et des amalgames concernant leur place des écrans dans la vie des jeunes, avec mes collègues et amies de l'École branchée, Stéphanie et Audrey. Certaines personnes m'ont fait remarquer que j'aurais plutôt dû parler des pratiques pédagogiques archaïques qui ont encore cours dans nos écoles. Ce commentaire est arrivé juste à point.


Justement, des pratiques dépassées se pointent dans ma vie par le biais de ma fille qui est étudiante dans un cégep de la rive-sud de Québec. Eh oui, encore moi avec mes péripéties en lien avec les études collégiales de ma progéniture. À entendre les paroles de certains enseignants qu’elle et ses amies me rapportent, je me demande bien dans quel siècle ceux-ci vivent.


Je ne comprends pas comment on peut se prétendre enseignant ou professeur en 2024 et entretenir des pratiques du passé, comme si le monde n’avait pas changé au cours des dernières décennies. Je ne comprends pas comment il est possible d’ignorer les pratiques efficaces, la différenciation pédagogique, la rétroaction constructive, en 2024. Je ne comprends pas pourquoi les directions des établissements d’enseignement permettent des pratiques aussi disparates d’un enseignant à l’autre. 


Est-ce moi où cela ne devrait pas être accepté qu’en 2024, on retrouve des enseignants qui disent des choses comme « Au moins la moitié d'entre vous ne passeront pas mon cours », « Vous n'auriez pas dû passer le cours précédent », « Il y a toujours un tamis qui doit se faire, mais certains professeurs vous la rendent trop facile », « Vous êtes jeunes et vous avez le temps de reprendre un cours deux ou trois fois pour parfaire vos connaissances ».


Est-ce moi où cela ne devrait pas être toléré qu’en 2024, on retrouve des enseignants qui dictent littéralement à des étudiants la façon dont ils doivent se comporter (et de façon peu élégante) : « Si vous ne mentionnez pas ceci dans votre texte, je vais vous couler », « Si vous oubliez de mentionner cela, je vais vous couler ». Aucune créativité, aucune liberté de pensée, au nom de rigueur intellectuel, tous doivent adopter le même moule.


Je croyais bien naïvement que ce type de commentaires qui frôle l'intimidation n’avait plus sa place dans les écoles en 2024. Il me semble qu'à l'heure de l'inclusion où on appelle à former plus de diplômés au nom de la réussite éducative, ce type de pratique devrait être complètement évacué. Où sont passées la bienveillance et la résilience dont on parle tant dans cette ère post-pandémique?


Accompagner les étudiants dans la découverte des subtilités du langage? Oui.

Ouvrir leurs horizons face à l’univers des possibles? Tout à fait.

Permettre le dialogue, l’écoute active, la collaboration et la rétroaction? Encore plus.

Favoriser la persévérance, stimuler la motivation? Toujours.


Les professeurs qui osent encore aujourd'hui faire ce genre de commentaires désobligeants, élitistes, snobinards, devraient se faire rabrouer. Ceux qui disent « dans mon temps, j’ai bûché alors, vous allez bûcher », à ceux qui disent « moi alors vous »…. Quelle étroitesse d'esprit! 


Le milieu scolaire devrait être un milieu de progrès et non d’immobilisme. Imaginez-vous qu'il y a encore des professeurs qui n'ont même pas de PowerPoint à afficher à l'écran « parce que vous n'aurez pas le choix d'écouter et de prendre des notes si vous voulez passer mon cours sinon tant pis pour vous ».


Aucune possibilité de revoir des notes pour se rafraîchir la mémoire. Aucune diversification dans les apprentissages pour ceux qui seraient plus visuels. Sans l'écoute et la mémorisation par cœur, tu couleras! C'est normal que certains jeunes vivent des échecs, mais pouvons-nous au moins leur donner des conditions favorables et des conditions gagnantes pour qu'ils cheminent vers la réussite?


Et pire encore, au moment où je termine la rédaction de ce billet, un ami me rapporte qu’une membre du personnel du cégep en question a demandé à quelques étudiants de ne plus se présenter à son cours, à quatre semaines de la fin de la session, parce qu’« elle ne souhaite plus leur enseigner ». Elle leur a clairement indiqué que s’ils se présentent aux prochains examens, elle leur attribuera automatiquement un échec. Ces jeunes ne sont pourtant pas en situation d’échec en ce moment. Depuis quand les enseignants peuvent faire de l'enseignement sélectif et prédire le succès ou l'échec d'un jeune? S'ils vont se plaindre à la direction, que pourra-t-elle véritablement faire? Aura-t-elle la volonté de faire quelque chose?


Je dois dire que ce type de pratique me laisse pour le moins perplexe, en colère même. Le fait qu’elle persiste encore dans nos écoles en 2024, c’est vraiment le signe que le système scolaire est dû pour un bon électrochoc. Après, on se demande pourquoi les jeunes sont de plus en plus anxieux et décrochent. Ce type de pratique n’est pas du tout en phase avec le monde dans lequel ils veulent vivre et se développer.


Décidément, je suis une mère au front pour un meilleur système d’éducation! 

samedi 13 avril 2024

L'éducation du futur


Quelle discussion pertinente et nécessaire avec Mélanie Labbé, de Cofomo Québec et de Mon Avenir TI, et Sophie Viger, de 42 The Network, dans le cadre de la Semaine numériQC. J'y prenais part en tant que rédactrice en chef des médias de L'École branchée.

De plus en plus de jeunes Québécois quittent le système scolaire traditionnel sans diplôme. L’arrivée de l’intelligence artificielle générative fait peur dans bien des milieux scolaires; les enseignants reviennent au papier et au crayon. Avec la révolution numérique en cours, les jeunes doivent pouvoir développer les compétences nécessaires pour intégrer le marché du travail de demain.

Or, nos écoles ne se transforment pas assez rapidement pour accrocher, motiver et engager les jeunes. Il devient de plus en plus urgent d’adopter de nouvelles pratiques d’enseignement et surtout de nouveaux modes d’évaluation. Au niveau primaire et secondaire, des parcours alternatifs ont vu le jour au fil des années. Au collégial et à l’université, les changements sont plus lents, des programmes sont dépassés et n’arrivent pas à se mettre à jour assez rapidement pour suivre l’évolution des changements technologiques.

Des modèles proposant des pédagogies innovantes existent (allô 42 Québec et le 42 The Network et CyberCap). Ils deviennent des alternatives intéressantes pour ceux qui ont le potentiel, mais ne se retrouvent pas dans le système scolaire traditionnel. Par contre, nous devons aussi pouvoir reconnaître les compétences acquises dans le cadre de ces formations hors normes. Les badges numériques ou d’autres formes d’attestation représentent-ils des avenues intéressantes?

Une chose est sûre, nous devons nous mettre en action pour offrir une diversité de parcours de formation aux jeunes, pour leur permettre de développer des compétences comme la créativité, le jugement critique, la collaboration et la résolution de problème. Nous devons aussi nous mettre en action pour reconnaître les apprentissages fait tout au long de la vie, de manière autodidacte. Les entreprises adapteront-elles leurs critères d’embauche dans un contexte où la pénurie de main-d'œuvre persistent? Elles ne peuvent se passer d’aucun talent disponible.

En résumé, je reprends les mots de Mathieu Naud, directeur de Noschool : « Réussir à faire "apprendre à apprendre" pour les jeunes d’aujourd’hui est devenu essentiel! Pourquoi? Le monde a déjà changé! Notre éducation basée sur la précédente révolution industrielle ne prend pas en compte la nouvelle révolution... numérique, celle-là »!