Le Forestier en chef du Québec vient de publier son bilan 2008-2013 sur l'état de santé de la forêt publique québécoise. Déjà, ça me surprend un peu que le bilan s'arrête à 2013 alors que nous sommes à la fin de 2015. Je comprends quand même que cela peut être long de colliger ses données.
D'entrée de jeu, le Forestier en chef note que la forêt québécoise est en bonne santé. Voici l'information que la majorité des gens qui seront informés du rapport retiendront probablement. Ce rapport ne sera probablement pas très médiatisé de toute façon.
En lisant un peu plus loin, par contre, on se rend vite compte que le Forestier en chef souligne un important manque de rigueur dans l'exploitation de la forêt québécoise, un manque de vision économique, qui limite (ou pourrait nuire) à la vitalité du secteur. C'est l'interprétation que j'en fais, mais voici des données extraites telles quelles du rapport qui me font penser cela.
Seulement 55% des possibilités forestières ont été récoltées entre 2008 et 2013. À trop vouloir protéger la forêt, peut-être qu'on ne l'exploite plus suffisamment.
Voici même un petit tableau que je trouve parlant sur l'importance de la forêt versus son exploitation.
Voici les passages du rapport du Forestier en chef qui m'ont poussé à réagir ici:
« Je suis préoccupé par l'appauvrissement de la matière ligneuse en qualité et en valeur. Je constate par ailleurs que la culture plus intensive de la forêt demeure marginale et que les décisions d'aménagement sont peu fondées sur des analyses économiques. Il y a donc des défis majeurs à relever pour redonner de la vigueur au secteur forestier du Québec. »
« Je suis préoccupé par la tendance à récolter en priorité les bois et les peuplements qualifiés de plus intéressants. Ceci conduit à un appauvrissement qualitatif du stock ligneux... »
« En 2013, l’activité économique de l’industrie québécoise des produits ligneux générait un produit intérieur brut (PIB) de 8,3 G$, soit une contribution de 2,7 % à la richesse globale produite au Québec. En comparaison, ce PIB se chiffrait à 9,3 G$ en 2008. »
« Globalement, les peuplements les plus difficiles à prélever (isolés, lisières boisées, pentes fortes, etc.) ont eu tendance à être évités lors de la récolte. »
« Je recommande d'assurer des suivis plus rigoureux sur le terrain de façon à mieux mesurer l'effet des traitements sylvicoles dans le temps. »
Bref, si je comprends bien, on ne réalise pas vraiment d'analyses économiques avant d'entreprendre des travaux, on y va à l'aveuglette ou selon les endroits où ça nous tente d'aller récolter. Puis, une fois les récoltes terminées, on laisse aller les choses sans trop de suivis.
Développement durable....
Le seul véritable point positif du Forestier en chef est lorsqu'il note que le Québec a progressé dans la voie de l'aménagement durable et la conservation de la biodiversité. D'ailleurs, la proportion d’aires protégées est passée de 4,91 % en 2008 à 9,10 % en 2013 et le nombre de sites protégés pour les espèces fauniques est passé de 245 en 2008 à 1031 en 2013.
Mais encore là, le pot suit les fleurs: « Cependant, pour poursuivre dans cette voie, l'aménagement durable de la forêt doit aussi inclure un plan de mise en oeuvre qui comprend des indicateurs et des cibles de résultats afin de pouvoir mesurer les progrès du Québec ».
Puis au niveau des changements climatiques dont on entend si souvent parler, il recommande « d'acquérir les connaissances fondamentales requises pour faire face aux enjeux critiques tels les changements climatiques ». Donc, pour l'instant, on parle peut-être à travers notre chapeau sans expertise concrètes.
Conclusion: en matière de développement durable, on se targue d'en tenir compte, mais on avance définitivement sans véritable objectifs précis... Désolant!
Finalement, je ne peux pas passer sous silence la dernière recommandation du Forestier en chef, mais non la moindre:
« Implanter un système de gestion rigoureux
où, notamment, les suivis et les bilans de performance s’inscriront dans une
reddition de comptes ministérielle, ce qui permettrait également de faciliter
la promotion du régime et du secteur ».
Le rapport couvre les années 2008 à 2013... nous sommes en 2015. Je doute que ce qui est décrit dans le rapport ait vraiment changé.
Ma recommandation à moi sera donc:
Soyons plus réfléchi, appuyons nos décisions sur des analyses crédibles, arrêtons d'y aller au « feeling ».... Et cela devrait valoir pour plusieurs secteurs de notre économie.