samedi 15 janvier 2022

Le numérique peut-il être durable et responsable?

 

Les usages du numérique ont définitivement des impacts sur l’environnement. Cela n’est plus un secret et on en entend de plus en plus parler. Et si en plus de viser des usages plus écologiques et durables, on visait aussi des usages plus responsables? C’est ce que propose Rémy Marrone, directeur de projets à l’Institut du numérique responsable en France. 

D’abord, il apparaît nécessaire de faire la distinction entre toutes les expressions utilisées. Dans un récent article publié sur le site de l’École branchée, je propose justement des définitions. Je ne reproduirai pas tout ici mais en bref disons que :

  • L’expression « numérique durable » concerne un ensemble de techniques visant à réduire l’empreinte sociale, économique et environnementale du numérique.
  • Le « numérique responsable » prend en compte les éléments du numérique durable, mais il encourage aussi des usages qui favorisent la diversité, l’équité et l’inclusion.
Lors d’une conférence présentée à l’occasion de la plus récente Connected Week, en France et à laquelle j’ai assisté, Rémy Marrone a soutenu qu’il serait désormais opportun de penser le numérique, et plus particulièrement le Web, comme quelque chose d’Utile, qui peut être Utilisé et qui est effectivement Utilisable pour le plus grand nombre.

Qu’est-ce que ça veut dire concrètement?

Le numérique responsable encourage la parité des genres, la représentation de la diversité, l’accessibilité des contenus sur le Web pour tous. Il pousse à se poser des questions sur les contenus que l’on publie. Par exemple, une vidéo prend beaucoup plus de bande passante que du texte et est moins accessible. Donc, avant de produire et publier une vidéo, il peut être opportun de se demander si cette vidéo est vraiment nécessaire. De même, toute vidéo devrait être accompagné d’un texte qui la résume.

Rémy Marrone s’adressait plus particulièrement aux entreprises et individus qui créent du contenu pour le Web. Il les invitait à poser un regard sur les biais qu’ils peuvent reproduire, sur l’image qu’ils projettent ou les comportements qu’ils peuvent encourager : qui mettent-ils en scène dans les images qu’ils publient? Mettent-ils des textes alternatifs sur les images pour maximiser leur accessibilité? Font-ils la promotion d’opérations marketing qui encouragent la surconsommation? Les images et vidéos qu’ils publient sont-ils si lourds qu’ils amènent leurs utilisateurs à utiliser des appareils plus performants?

Le site Numérique responsable qu’il a donné en référence est particulièrement intéressant pour découvrir des principes à adopter pour vivre un numérique plus responsable et plus durable. Vous pouvez aussi mesurer l’impact environnemental de votre site Web sur ce site. Je présente également d’autres exemples dans mon article paru sur le site de l’École branchée.

Numérique et électronique

Dans le cadre de la Connected Week, d’autres conférences portaient sur l’impact des usages du numérique sur l’environnement et la société. Les paragraphes qui suivent sont un condensé de ce qui a été discuté. J’ai particulièrement aimé la conférence de Marion Simon qui avait bâti celle-ci autour d’un quizz Menti très interactif pour les participants. (Voyez par vous-mêmes sur la photo qui accompagne ce texte!)

Lorsqu’on parle de numérique, on parle nécessairement d’électronique. Le numérique, ce sont les données, le reste est du matériel. Le développement des objets connectés de toute sorte fait croître ce marché et ajoute de l'électronique là où il n’y en avait pas. Suffit de penser aux montres et aux thermostats qui sont devenus intelligents. Et puis, nos voitures sont équipées d’un nombre croissant de pièces électroniques, comme les caméras de recul qui sont devenues la norme. Cela ne semble pas prêt de s'arrêter.

De même, derrière chaque donnée que nous collectons et conservons dans l’infonuagique (le fameux « cloud »), il y a un espace occupé sur un serveur et donc une consommation d’énergie perpétuelle. Au Québec, on se la coule douce avec ça parce que nous profitons de l’hydroélectricité, mais ailleurs dans le monde, la situation est tout autre. Nous aurions peut-être intérêt à devenir un peu plus conscient de notre consommation énergétique.

Finalement, la norme du « porter-jeter » avec nos appareils électroniques aura peut-être une limite. 50 métaux sont nécessaires à la fabrication d’un téléphone intelligent. Ces ressources ne sont pas inépuisables. La réparation devrait revenir à la mode plutôt que le remplacement des appareils. En France, la loi anti-gaspillage pour une économie circulaire vise par exemple « une meilleure information du consommateur sur le caractère plus ou moins réparable de ses achats ». Ainsi, depuis le 1er janvier 2021, l'indice de réparabilité est déployé sur 5 catégories de produits électroménagers et électroniques.

Ça prenait ça pour forcer certains géants du numérique pas très portés sur la réparation à bouger. Apple publie maintenant un indice de réparabilité de ses appareils et commence timidement à rendre accessible des pièces pour que nous puissions réparer nous-mêmes ses appareils.

La France fait aussi figure de précurseur avec sa nouvelle loi sur le numérique responsable. Par le biais de cette loi, les jeunes français seront désormais formés à l’écoresponsabilité et à la sobriété numérique. Ça aussi, j’en ai parlé sur le site de l’École branchée.

Ceci étant dit, il ne faut pas non plus se taper sur la tête et se dire qu’on n’utilisera plus le numérique (cela serait complètement irréaliste de toute façon). Par contre, il est possible de poser un regard sur ses usages du numérique et revoir certains comportements. Est-ce vraiment nécessaire de changer de téléphone tous les deux ans? Est-ce vraiment nécessaire de conserver toutes ses photos numériques? N’y aurait-il pas un petit ménage à faire?  Est-ce préférable de télécharger ce film ou cette musique plutôt que de l’écouter en « streaming » ?

Ici, c’est comme dans tout, l'important est de trouver un certain équilibre et de se rappeler que chaque petit geste compte. Par contre, on voit qu’en France, ce sont des lois qui font bouger les choses plus rapidement. J’ai comme l’impression que cela devra être la même chose ici. Surtout, en ce moment, alors que le numérique est le centre de notre univers. N’est-ce pas grâce au numérique que notre société peut continuer de fonctionner depuis deux ans?


* Sur la photo, la fois où j'étais beaucoup trop contente de participer à un quiz Menti. Crédit photo : Annie Chénier.

**Ce texte devait faire partie de la série 12 jours avant Noël.

2 commentaires:

  1. Merci pour ce billet. Comme dans le cas du recyclage et du compost, la première est définitivement une prise de conscience. Je suis une adepte du recyclage et du compost et pourtant - sérieux 😳 - j'ai du mal à prendre le virage du numérique responsable. Les premiers gestes d'éviter la consommation d'équipement sont posés dans mon cas, mais je suis un peu loin de faire le ménage des mes appl ou éviter le cloud 😢 Je ne suis même pas capable de répondre à la question : « Est-ce préférable de télécharger ce film ou cette musique plutôt que de l’écouter en « streaming » ? » La réponse est le téléchargement 🤨🤔

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  2. Avant même de songer au numérique responsable, il est nécessaire de simplement mieux comprendre le numérique. Merci pour ton article, je ne connaissais pas l'Institut du numérique responsable. Je vais aller m'en inspirer. Au plaisir.

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