Une nouvelle (télé)réalité débute cette semaine chez moi. Ma fille est en 3e secondaire. Nous habitons en zone rouge. Elle se rend donc à l'école une journée sur deux, l'autre journée, elle « fréquente » l'école à partir de la maison. La mesure est prévue jusqu'au 23 novembre. Soyons donc optimiste en nous disant qu'elle est temporaire, pour quelques semaines seulement.
Déjà, en apprenant la nouvelle, j'ai eu plusieurs « flashback » du printemps dernier, alors que l'école de la mi-mai à la fin juin a été complètement en ligne, sans évaluation. Des « flashbacks » pas toujours agréables, même si quelques jolis souvenirs perdureront.
Pour les jeunes, habitués à l'encadrement strict de l'école, guidés (pour ne pas dire conditionnés) par le son des cloches qui annoncent chaque moment de la journée (rentrée, récré, dîner, etc.), ce n'est pas naturel de regarder l'heure et de savoir quand se brancher pour le prochain Zoom.
Surtout, ce n'est pas naturel de devoir faire preuve d'initiative et de compléter des travaux seuls, sans être captif d'une salle de classe. Oui, il y a bien les devoirs, mais ça, c'est le soir, sur le coin de la table de la cuisine. Là, c'est une autre « game ».
Bref, le dernier mois de l'année scolaire 2019-2020, je l'ai passé à guider ma fille dans ce qu'elle devait faire, à l'aider à terminer ses travaux, à surveiller pour m'assurer que tout était fait. À jouer le chien de garde.
J'ai les capacités pour le faire, les connaissances (même si je ne la suis à peu près déjà plus en mathématiques), l'intérêt et surtout la disponibilité. Et elle est enfant unique.
Je n'ose même pas imaginer le défi que cela représente dans les familles plus nombreuses, où les parents sont moins disposés à aider et à accompagner, où le matériel informatique manque, avec des enfants du primaire qui ont besoin de plus d'encadrement à la maison, etc.
Donc, j'avais une certaine appréhension face à cette nouvelle perspective de l'école à la maison. De un, impossible d'avoir une routine pour les jeunes. Une journée, tu te lèves tôt, le lendemain, tu te lèves 30 minutes (sic) avant ton premier cours, et ainsi de suite. De deux, les enseignants ne peuvent faire plus de 45 minutes de vidéoconférence (sur des périodes de 75 minutes). Théoriquement, ils doivent donner 30 minutes de travaux à terminer. De trois, ils rebrassent leur planification et déplacent des examens pour que ceux-ci puissent se tenir les journées de présence à l'école. L'enjeu de l'évaluation à l'ère numérique, on pourra en reparler.
Je me dis que je dois aborder la situation avec zénitude. Et j'ai décidé de partager l'aventure ici (de mon point de vue de parents seulement). Nous sommes plusieurs à être dans le même bateau après tout, aussi bien partager nos expériences et s'entraider.
Première journée hier:
1- 45 minutes d'espagnol, suivi d'une longue pause sur les réseaux sociaux jusqu'à la deuxième période, car aucun travail à compléter.
2- 45 minutes d'histoire (problème de stabilité du réseau parce que j'étais en vidéoconférence en même temps que ma fille), suivi de 30 minutes de travaux (que j'ai fait avec ma fille, après qu'elle ait annoncé qu'elle ne les ferait pas. Moi, je l'aime bien Samuel de Champlain!)
3- Déclaration choc, suivi d'un long soupir: « Je n'aime pas les Zoom. » avant le cours de sciences. Un autre 45 minutes (re: problème de réseau) suivi d'un travail. (que ma fille a fait seule; les sciences, c'est plus sa tasse de thé que l'histoire)
4- 45 minutes d'anglais pour terminer la journée, suivi de la lecture d'un texte et recherche de définition de mots dans le dictionnaire, euh Google. J'ai donc participé à la recherche étant donné que j'étais déjà sur l'ordinateur en télétravail.
Également, je dois préciser que j'habite en face de l'école de ma fille. Pendant les périodes de pause, elle est donc sortie (masquée) pour aller voir ses amis dans la cour. Pour sa part, c'est le côté social de l'école qui lui manque le plus. La motivation, elle n'en a pas tant, mais je réussis à compenser en faisant la « cheerleader ».
Bilan de la journée:
Patience et accompagnement sont les mots d'ordre pour moi. Je me dis qu'il faut traverser cette période sans trop d'écueil mais que ce ne sera pas simple. Si je dois sacrifier un peu de ma productivité au travail pour faire en sorte que ma fille persévère, je suis prête à le faire. Je me dis que plusieurs jeunes seront laissés à eux-mêmes les journées d'école à la maison (sans mauvaise volonté des parents). Je me dis que ça représente un méchant défi pour tout le monde. J'essaie de ne pas penser aux conséquences, mais je me dis aussi qu'il ne faut pas trop se mettre de pression sur les épaules.
Suite
Je vais continuer de documenter mon « expérience » dans les prochains jours/semaines.
Parallèlement, la vie m'a ramené sur le chemin de l'École branchée où j'ai déjà passé une partie de ma carrière professionnelle. C'est avec joie que je retrouve l'équipe pour mener à bien un nouveau projet, tout à fait en lien avec ce que je viens de vous raconter.
Comme moi, plusieurs parents accompagnent présentement leur.s enfants. dans l'apprentissage à distance. Cette responsabilité s'ajoutent à leur rôle de parent. Qu'est-ce qui les préoccupent? De quelles ressources ont-ils besoin? Ce serait bien si on pouvait partager ce moment de grands défis ensemble.
Ainsi, je collabore avec l'École branchée pour réaliser, dans un premier temps, un sondage auprès des parents québécois. Les résultats du sondage serviront à alimenter le contenu d'un numéro spécial du magazine qui sera préparé spécifiquement à l'intention des parents. Normalement, le public de l'École branchée, ce sont les enseignants. En ce moment, nous voulons aussi rejoindre les parents. Mon expérience personnelle pourra alimenter la production du magazine, mais j'ai surtout besoin de vous entendre sur le sujet. Je ne suis sûrement pas la seule à me sentir parfois démunie et impuissante face à la situation. Soyons solidaires!
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