vendredi 6 décembre 2019

Humain + innovation = transformation




Le 14 novembre dernier, j'ai eu la chance de présenter une conférence dans le cadre des Rendez-vous numériques, organisés par l'Institut Technologies de l'information et Sociétés (ITIS) de l'Université Laval. J'étais présente à titre de diplômée de l'Université Laval et je venais y présenter mon parcours, près de 20 ans après avoir quitté les bancs de l'Université (ouf!, le temps passe vite!).

J'avais accepté, il y a déjà plusieurs mois, l'invitation de Gilles Rioux (aucun lien de parenté) et de Sophie Girard-Boily. Je me sentais privilégiée de pouvoir partager mon cheminement avec un auditoire et je ne cacherai pas que je l'ai perçu comme une belle reconnaissance pour le travail accompli avec passion au cours des dernières années.

Dans ma présentation, j'ai voulu aborder mon parcours professionnel mais surtout comment celui-ci m'a amené dans le merveilleux monde du numérique en général et de l'accompagnement à la transformation numérique en particulier. Je voulais présenter des exemples, des constats et surtout discuter avec les gens présents, en toute simplicité.

Au cours de la conférence, j'ai voulu éviter les mots à la mode comme « écosystème », « paradigme » (oui, oui, CFD, je ne l'ai pas prononcé une seule fois!), «co-création » et « gestion du changement ». Je voulais surtout parler de l'humain qui est au coeur de la transformation. Je voulais parler de leadership, d'écoute et de dialogue.

Comme j'aime bien garder des traces et partager aussi, je rends ma présentation disponible ici. Je vous donne aussi dans les paragraphes suivants un résumé (quand même long!) du message que je souhaitais transmettre.

Mon parcours
Je suis diplômée en communication publique, profil journalisme écrit, de l'Université Laval. J'ai débuté ma carrière dans un hebdo de Québec. Rien ne me destinait vers l'univers des technologies de l'information et des communications (TIC) comme on les appelait à l'époque. Puis, j'ai trouvé un emploi chez De Marque, comme rédactrice pour le site web d'information en éducation et TIC et le magazine l'École branchée. Voilà, j'étais tombée dans la marmite et je découvrais le potentiel incroyable de ces outils modernes qui commençaient à se déployer.

Depuis ce temps, ma conviction est la suivante:
« Chacun devrait pouvoir avoir accès à la technologie et pouvoir l'utiliser comme outil d'apprentissage et d'ouverture sur le monde ». 

De Marque est une entreprise qui a elle-même été appelée à se transformer avec l'avènement des technologies. Le projet le plus déterminant a été la mise en place, en partenariat avec l'Association nationale des éditeurs de livres, d'un entrepôt de livres numériques, qui a permis aux éditeurs québécois de distribuer leurs livres partout dans le monde en format numérique. 

C'est là que j'ai découvert l'importance de l'accompagnement dans la transformation vers le numérique, la nécessité d'expliquer, de rassurer, de former. Le numérique n'est jamais une fin en soi. C'est un outil. Un outil qui offre des possibilités nouvelles et apporte son lot d'opportunités. Le numérique doit devenir un état d'esprit. Lorsqu'il nous habite, on sait de quoi il s'agit.

J'ai ensuite participé au déploiement d'un intranet social, destiné à l'ensemble des employés de La Capitale Groupe financier. Une nouvelle plateforme qui pouvait faire peur à certaines personnes et susciter des inquiétudes. J'ai formé des ambassadeurs, préparé une nétiquette, collaboré avec les équipes TI et RH pour un déploiement progressif, accompagner, rassurer encore. Au final, la nouvelle plateforme a permis des communications internes plus efficaces, a donné plus de liberté aux employés qui devaient publier du contenu et a offert une façon nouvelle et moderne de collaborer et d’échanger.

Finalement, mon passage chez Québec numérique m'aura permis de découvrir une communauté numérique tissée serrée, prête à partager, à donner et à redonner à tous ceux qui ont soif d'apprendre et de découvrir le potentiel technologique. 

Ces expériences ont fait de la transformation numérique une véritable mission pour moi. Je vous réfère à ma conviction écrite ci-haut.

L’Humain

D’entrée de jeu, il faut mettre quelque chose au clair : le numérique ne doit jamais être une façon de faire la lutte au papier. Ce ne sont pas deux mondes qui s'affrontent. Le numérique doit être considéré comme un moyen permettant de répondre à certains besoins.

D’abord et avant tout, le numérique est une affaire d’humain. La transformation, le changement, doit s’opérer par et pour les humains. Il faut toujours se rappeler cette prémisse de départ.

Au fil de mon expérience, les clés du succèsvers la transformation numérique me sont apparus comme étant les suivantes. Ce sont mes humbles observations que je souhaite transmettre sans prétention.

  • Leadership : il doit y avoir un leader qui porte la transformation, un porte-parole fort qui donne la direction à suivre. Idéalement, le leader est très haut dans la hiérarchie. Il doit y croire et rallier les troupes avec lui. Il donne la vision à suivre. Il s’entoure de gens qui le seconde.

  • Être prêt à vivre le changement : Le leader et l’équipe qui mène le changement doivent être convaincu de la pertinence, de la nécessité, de la légitimité de leur démarche. Ils rencontreront des sceptiques, des inconfortables, des craintifs, des hésitants. Ils doivent donc avoir une conviction qui ne les fera pas reculer. 

  • CONSULTER : Bien que la vision de départ soit connue, il est nécessaire de consulter les personnes touchées par la transformation. Ce sont elles qui la vivront au quotidien et elles doivent pouvoir s’exprimer sur certains points et se reconnaître dans la transformation en cours.

  • Faire AVEC : Le fait de consulter, de désigner des ambassadeurs du changement, de faire preuve de transparence sur les étapes menant à la transformation permet de rallier les personnes touchées qui embarqueront dans le projet.

  • Rassurer / accompagner : La transformation numérique est surtout un changement de culture personnelle et organisationnelle. Revoir ses façons de faire, développer de nouveaux réflexes, de nouvelles manières de travail, de communiquer, cela demande un effort que tous ne sont pas naturellement prêt à fournir. 

  • Expliquer / communiquer / former : Il faut comprendre le pourquoi et le comment pour embarquer dans un projet, se sentir comme étant partie prenante pour développer un sentiment d’appartenance à l’égard du projet. Parfois, il faut pouvoir acquérir des nouvelles compétences pour pouvoir y contribuer pleinement. Ce dernier point ne doit jamais être négligé.

Deux images qui valent 1000 mots

Les gens en général sont souvent enclins à demander du changement mais lorsque vient le temps de changer soi-même, les volontaires sont soudainement moins nombreux.



Pris dans le quotidien, il est parfois difficile de prendre un pas de recul pour voir le véritable bénéfice d’un changement. Cela vaut généralement la peine de s’arrêter un peu pour essayer.



L’innovation

L’innovation, c’est aborder les choses autrement, trouver de nouvelles façons de faire, et cela va bien au-delà du numérique. En conférence, j’ai donné un exemple qui fait sourire mais qui illustre bien ce que je veux dire.

Prenez une pomme de terre. Vous pouvez l’apprêter de différentes façons (purée, frites, au four, etc.). Cela demeurera toujours une simple patate. Bref, avec les mêmes ingrédients, additionné d’un peu d’imagination, vous pouvez arriver à un résultat différent. Plus simple, plus rapide, plus goûteux ou juste différent. Vos enfants seront mécontents si ce soir, vous n’apprêtez pas les patates de la même façon qu’à l’habitude, mais ils pourraient bien se mettre à préférer la nouvelle méthode !

Pour ceux qui innovent, il devient important d’apprendre à relativiser et à mettre en perspective les questionnements suscités. Je n’ose pas écrire le mot résistance, car ce n’est généralement pas de la résistance pur et dur. C’est beaucoup plus nuancé.

Si l’objectif est de répondre à un besoin, ce besoin est-il répondu à la fin ? Peu importe, le moyen pour y arriver. Le changement demandera toujours une période d’adaptation. Il faut la comprendre, passer à travers les commentaires négatifs, expliquer plus, former mieux. Mais, attention, il faut savoir reconnaître les commentaires négatifs qui sont plus déterminants et qui pourraient faire la différence entre le succès et l’échec de votre projet.

La grande question dans la recherche de solutions innovantes est souvent « par où je commence ? ». Alors, dites-vous que c’est comme faire un casse-tête. Vous ouvrez la boîte et vous êtes découragé. Vous n’y arriverez jamais. Puis, vous sortez les morceaux et vous vous faites un plan de match. Vous sortez les coins, le tour, groupez par couleur, etc. Vous êtes parti !

Une autre des questions est « pourquoi je changerai ? ». Le gain offert par le numérique est trop souvent intangible au départ, il semble abstrait et lointain. Pourtant, je suis convaincu qu’il existe un moment que j’aime appeler « le déclic ». C’est le moment où vous comprenez à quoi la transformation vous servira. Accéder à un service plus simplement, prendre en charge un problème plus efficacement, etc. Je crois que le déclic peut se produire pour tout le monde.

La transformation

Le jour ou l’Humain et l’innovation sont réunis, la transformation peut se produire. Celle-ci est un long chemin parsemé de toutes sortes d’embûches, mais qui vaut la peine d’être traversé.

Trois certitudes m’habitent en ce qui concernent la transformation numérique 
  • Il faut identifier des ambassadeurs (les convaincus dès le départ) et avancer avec eux. Ils deviendront source d’inspiration et susciteront l’intérêt. 
  •  L’effet boule de neige arrivera. Les succès des uns inspireront les autres et l’effet d’entraînement se produira, permettant au mouvement de transformation de s’accélérer.
  • Il vaut mieux miser sur la théorie des petits pas. Chaque changement compte. Il ne faut pas penser tout changer en même temps, il faut choisir ses priorités et relativiser le reste.

Par ailleurs, je le répète, pour que la transformation se concrétise véritablement. Il faut nécessairement « penser en-dehors de la boîte ». Si on se limite toujours au même cadre déjà connu, on ne changera pas vraiment. On pourra optimiser, moderniser un peu, mais pas réussir une transformation digne de ce nom. 

De même, si on se concentre uniquement sur le problème, sans ouvrir ses horizons, une solution toute simple pourrait nous passer sous le nez sans qu’on la voie. 

Les valeurs du numérique

Pour réussir une transformation numérique, il faut adhérer à des valeurs fondamentales, qui n’ont plus besoin de présentation d’après moi :

·     Ouverture
·     Partage 
·     Collaboration
·     Transparence

Rappelez-vous ses valeurs. Elles sont nécessaires à la transformation.

Depuis octobre 2018…

Depuis octobre 2018, le gouvernement du Québec s’est doté d’un ministre délégué à la Transformation numérique gouvernementale. L’objectif est de mener le vaste projet de cette transformation dans l’administration publique avec une vision gouvernementale commune et cohérente entre les différentes entités.

J’ai joint l’équipe du ministre en janvier 2019, il y a presque un an. Je ne vous cacherai pas que le chantier est immense. Mais en partant des prémisses écrites ci-haut, je suis optimiste pour l’avenir.

En juin, la Stratégie de transformation numérique gouvernementalea été publiée. Vous pouvez relire mon texte sur son lancement. Un accélérateur d’État, le Centre québécois d’excellence numérique (CQEN), a été créé et accompagnera les ministères dans la transformation, en plus de travailler sur des projets innovants. Des plans de transformation numérique, arrimé à la Stratégie, ont été demandé aux ministères et sont en cours d’analyse afin de constituer une feuille de route gouvernementale. 

Un comité d’expertsa été constitué afin de contribuer à l’élaboration de la première politique gouvernementale de cybersécurité. Le Centre québécois de cyberdéfense est voie de se mettre en place à l’intérieur du gouvernement. 

D’autres actions sont en cours et pourront être communiquées dans les prochains mois. 

On ne pourra pas tout changer d’un coup de baguette magique. Je crois cependant que la cohérence gouvernementale qui commence à s’installer permettra d’avancer plus vite et d’aller plus loin dans la transformation numérique de l’État. Chaque personne qui sera aussi optimiste que moi pourra contribuer à sa manière !

À lire aussi :
-->La transformation numérique est en marche… vous embarquez ?



vendredi 27 septembre 2019

La transformation numérique est en marche… vous embarquez?


La semaine dernière, j'ai eu l'occasion de présenter une conférence lors de l'événement ProTIC19, organisé par le Technocentre des technologies de l'information et des communications. Il s'agit d'un événement annuel qui réunit plusieurs professionnels oeuvrant dans le secteur numérique dans la région de la Gaspésie.

Dans ma vie passée, chez Québec numérique, j'avais déjà eu l'occasion de côtoyer plusieurs des personnes présentes et surtout de vivre le dynamisme de la communauté numérique gaspésienne. C'était donc un honneur pour moi de me rendre sur place à Carleton-sur-mer pour participer à l'événement. Je les remercie d'ailleurs pour l'accueil chaleureux.

L'organisation m'avait sollicitée pour présenter les différentes stratégies numériques qui sont actuellement en vigueur au gouvernement du Québec, et qui touche plus particulièrement la région de la Gaspésie.

Comme la conférence n'a pas été enregistrée ni webdiffusée, je prends le temps de reproduire une partie de mes propos au bénéfice du plus grand nombre, en plus de rendre disponible ma présentation en format PDF.

D'entrée de jeu, j'ai tenu à rappeler qui je suis. Oui, je suis aujourd'hui conseillère politique pour le ministre délégué à la transformation numérique gouvernemental du Québec, mais il y a longtemps que je baigne dans l'univers numérique. Il s'agit d'un sujet qui me passionne. Je crois sincèrement aux effets positifs que peut avoir l'intégration des technologies et je m'en fais une ardente défenderesse depuis des années. Je suis dans une philosophie d'actions; chaque geste compte et à le potentiel de faire boule de neige.

Les technologies et le numérique sont bien présents au gouvernement du Québec. La gouvernance a été jusqu'à maintenant très décentralisée. Il est parfois difficile de s'y retrouver parmi tous les projets en cours dans les différentes ministères et organismes. C'est un choc que j'ai eu en arrivant au cabinet du ministre Éric Caire.

Par contre, je sens que nous vivons actuellement un tournant. Nous sommes à l'aube de quelque chose. La volonté d'avancer plus vite dans la transformation numérique semble là et surtout d'avancer avec de plus en plus de cohérence, de collaboration et de partage à l'intérieur de la communauté gouvernementale. Il y a un intérêt et une curiosité en tout cas. C'est positif.

Je me permets de parler aujourd'hui de communauté gouvernementale. Cependant, jusqu'à maintenant, les stratégies / plans d'actions / politiques en lien avec le numérique avaient été des initiatives plutôt sectorielles (culture, éducation, économie, etc.) avec des objectifs d'accompagnement à l'utilisation du numérique, de maillage entre les acteurs sectorielles, de collaboration et de partage avec la communauté, de développement économique.

Premier plan numérique à avoir été adopté en 2014, il se poursuit jusqu'en 2021. Il vise principalement l'accompagnement et l'appropriation du numérique au sein des organismes culturels, ainsi que la visibilité et le rayonnement des contenus culturels.

J'ai notamment mentionné la stratégie d'accompagnement Culture/NumériQC offerte gratuitement à l'ensemble des acteurs du secteur culturel (mesure 99 du plan) et le nouveau Réseau des agents de développement culturel numérique (ADN) (mesure 120) qui vient d'être créé. Ce réseau vise à offrir un soutien supplémentaire aux différents milieux culturels, spécialement en ce qui concerne le développement de la culture des données. C'est deux mesures m'apparaissent très intéressantes étant donné qu'elles visent la gestion du changement et l'accompagnement dans l'appropriation de nouvelles pratiques.
Lancé en grande pompe en juin 2018, le Plan d'action numérique en éducation poursuit son déploiement. Il vise à la fois le développement des compétences numériques chez les apprenants, jeunes ou adultes, la valorisation du numérique comme outil dans les pratiques d'enseignement et la mise en place d'environnement propice au déploiement du numérique dans les écoles. 

L'un des jalons importants du PAN est le Cadre de référence de la compétence numérique qui a été publié en avril dernier. J'avais d'ailleurs rédigé un billet à ce moment pour saluer cette initiative. Le cadre devient un guide pour le milieu scolaire mais aussi pour le marché du travail et les secteurs de la formation continue. Il met notamment à l'avant la notion d'agir en citoyen éthique à l'ère du numérique et le développement des habiletés technologiques.

Plusieurs formations (auto formations et we binaires) ont été produites afin d'appuyer les enseignants et les gestionnaires scolaires dans l'appropriation du numérique. Ils sont toujours disponibles en ligneUne journée d'initiation du numérique en éducation pour les débutants est aussi en préparation pour le 8 novembre.

Ce nouveau plan lancé en février 2019 contient plusieurs mesures en lien avec la formation des travailleurs afin d'intégrer le plus grand nombre de personne au marché du travail, d'adapter la main d'oeuvre actuelle, de préparer la main-d'oeuvre du future et d'accroître la productivité des entreprises. 

Le plan propose par exemple le remboursement de 85% des frais de formation des travailleurs liée à l'acquisition de nouveaux équipements plus modernes et technologiques dans les entreprises. La formation en lien avec l'intelligence artificielle sont aussi soutenue par le plan. 

Lorsqu'on pense aux actions en économie, on pense immédiatement au programme Québec branché, qui vise le branchement des villes et régions à Internet haute vitesse. Ce programme se poursuit actuellement et il fera bientôt place à un nouveau programme Québec Haut débit, annoncé dans le budget provincial 2019-2020.

Le Plan d'action en économie numérique compte plusieurs mesures d'aide financière pour les entreprises du Québec. Il faut surveiller les appels à projets qui sont publiés régulièrement pour voir le potentiel d'activités économiques nouvelles. Il se décline en 5 axes qui vise entre autres à stimuler les innovations par les technologies et les données et à renforcer la position du secteur des TIC comme chef de file mondial.

Un axe vise l'accélération de la transformation des entreprises et l'adoption du commerce électronique. J'ai d'ailleurs mentionné le programme Virage numérique pour les détaillants québécois, qui a déjà permis à plusieurs entreprises du secteur du commerce de détail de prendre le virage au cours des derniers mois.

Même si elle ne constitue pas une stratégie officielle au même titre que les autres, je tenais à mentionner le programme EDNET, mis en place par le ministère du Tourisme et administré par les associations touristiques régionales (ATR). Chaque ATR déploie le programme de façon individuelle. Les organismes touristiques (à but lucratif ou non) peuvent obtenir de l'aide financière sur deux volets: déterminer leurs besoins en lien avec le développement numérique (diagnostic) et réaliser des projets précis.

Ce qui a changé depuis octobre 2018?
Le Québec a maintenant un ministre délégué à la Transformation numérique gouvernementale, Éric Caire, et une Stratégie de transformation numérique gouvernementale a été lancé en juin. Cette stratégie offre une vision gouvernementale, qui deviendra commune à l’ensemble des ministères et organismes. 

Elle vise à rallier l’ensemble de la communauté gouvernementale autour d’objectifs communs. D’ailleurs, des plans de transformation numérique ont été demandé à chacun au cours des derniers jours. Ils seront mis en commun pour présenter un portrait gouvernemental.

Ces actions visent au final à établir une plus grande cohérence dans le développement du numérique au gouvernement du Québec, à favoriser la mise en commun des ressources et projets, à concerter les actions afin de réduire les dédoublements et les décisions prises en silo. Ces actions visent à mobiliser tous les acteurs dans un mouvement de changement. 

Je dois dire que je suis très optimiste par rapport à la Stratégie. Il est si facile de faire preuve de cynisme. Je crois qu’il faut se donner une chance de réussir. Nous avons pensé la Stratégie comme un tout ambitieux mais réaliste à la portée des organisations gouvernementales mais aussi externes au gouvernement, comme les municipalités. Elles aussi pourraient choisir d’adhérer à nos ambitions et cibles.

La Stratégie est accompagnée de 16 mesures clés qui sont en train de se déployer, comme le lancement d’une offre de formation sur le numérique, le modernisation du cadre légal, la mise en place de plateforme à portée gouvernementale (notamment une plateforme de consultation publique à propos de laquelle je vous donnerai plus d’information sous peu). 

Un baromètre numérique sera même produit afin de permettre au public de suivre la progression de la transformation numérique de l’État.

Le Centre québécois d’excellence numérique (CQEN)
Dans la foulée du lancement de la stratégie, un accélérateur pour propulser la transformation au sein du gouvernement du Québec a été créé : le CQEN, une unité du Secrétariat du Conseil du Trésor. Le mandat du CQEN est d’accélérer et de faciliter la transformation numérique en favorisant le partage et la collaboration.

L’équipe travaillera sur plusieurs fronts en lien avec la gouvernance, les compétences, l’innovation, l’architecture, la gestion et la sécurité de l’information, la performance. L’un des objectifs du CQEN est aussi de se rapprocher de l’écosystème numérique. J’ai donc profité de ma conférence (et je le redis ici) pour transmettre le message que le gouvernement du Québec s’ouvre à la communauté. Les échanges avec le milieu sont importants pour nous et nous voulons les accroître.

Dans l'actualité
Je ne pouvais pas passer sous silence certains dossiers plus d'actualités qui concernent le ministre délégué à la Transformation numérique gouvernementale: 

  • la plateforme d'authentification et d'identification gouvernementale, Accès UniQC, pour laquelle le dossier d'affaires est en préparation; 
  • les travaux en cours afin de renforcer la sécurité de l'information, qui passe notamment par la création d'une unité de cyberdéfense et qui donnera lieu à la publication d'une Politique québécoise de cybersécurité;
  • le projet de loi no37 visant principalement à instituer le Centre d'acquisitions gouvernementales et Infrastructures technologiques Québec et qui signifie la dissolution du Centre de service partagé du Québec (CSPQ).

Le mot de la fin
Au final, le message que je voulais passer est que nous avons tous un rôle à jouer dans la transformation numérique du gouvernement et de notre société. Il revient à chacun d'emboîter le pas et de devenir un agent de changement, un agent mobilisateur dans son milieu. Il est facile de critiquer mais le numérique passera par des convertis qui auront un discours assez forts et convaincants pour entraîner d'autres personnes dans la vague. Le numérique n'est plus une option, il est un allié de taille pour notre société. À nous de nous l'approprier à bon escient pour en faire un accélérateur, un outil d'efficacité et de mobilisation. 


En terminant ce billet qui est déjà beaucoup trop long, je tiens à dire que j'ai été encore une fois agréablement enchantée par le dynamisme gaspésienne. Cette communauté tissée serrée développe des projets incroyables compte tenu du contexte territorial pas toujours évident. La Gaspésie est d'ailleurs la seule région administrative du Québec a avoir mis en place sa propre Stratégie numérique. Bravo!

* Crédit photo: La nomade photographie


lundi 2 septembre 2019

Cacher ce cellulaire que je ne saurais voir...


Ce n'est pas la première fois que j'écris au sujet de l'éducation et de l'utilisation des technologies de l'information et de la communication, au sujet de l'usage qu'en font nos jeunes et de l'importance des les accompagner pour qu'il en fasse un usage adéquat. Ces sujets m'intéressent au plus haut point.

Le 28 avril dernier, j'écrivais:
«... ce n'est pas parce que tout se transforme autour de nous que nous savons comment utiliser ces outils à bon escient. Il y a toujours deux côtés à une médaille: ils peuvent propulser votre carrière en avant ou la détruire à tout jamais. Le meilleur et le pire peuvent arriver avec le numérique. Voilà pourquoi il devient si déterminant d'apprendre à s'en servir intelligemment, adéquatement, de façon éthique... ».
Cela vaut autant pour les jeunes que les adultes.

Dans ce domaine, ma philosophie a toujours été et demeurera: éduquer plutôt que censurer. En 2006, je produisais d'ailleurs un magazine qui en faisant son thème principal. Le magazine l'École branchée poursuit aujourd'hui sa mission de promouvoir l'usage pédagogique du numérique à l'école.

À l'occasion de la rentrée scolaire, le Journal de Québec se penche sur l'usage du cellulaire à l'école. On généralise en parlant d'interdiction du cellulaire dans des écoles en France. Ce n'est pas clair si les autres appareils technos sont aussi interdits. Ce n'est pas clair si les élèves ont quand même des cours d'informatique (ou des cours où les appareils sont permis) afin d'acquérir certaines notions. Ont-ils l'occasion de s'initier à la robotique et à la programmation? Les réponses viendront peut-être dans la suite prévu cette semaine.

Pour le moment, je choisis de retenir de ce dossier la citation suivante (qui est très très loin dans le texte, surtout dans la version en ligne):
« Le cellulaire est un problème majeur, mais en interdisant, est-ce qu'on éduque vraiment? On s'imagine qu'on a réglé le problème, mais ce n'est pas le cas. »
Cette citation est de Thierry Karsenti, professeur à l'Université de Montréal et titulaire de la Chaire de recherche du Canada sur les technologies de l'information et de la communication en éducation.

Elle vient résumer la problématique. Oui, il existe un urgent besoin d'outiller les jeunes dans l'usage qu'ils font de leurs appareils électroniques. Il y a un temps pour chaque chose et chaque chose en son temps. Par contre, en interdisant tout simplement, on se ferme les yeux et on passe à côté d'une excellente occasion de sensibiliser.

Interdire dans certaines situations, d'accord. Mais interdire mur à mur, non.

Des règles simples peuvent être mises en place par les écoles (comme cela peut aussi être le cas à la maison).
  • En classe, par exemple, l'utilisation d'un appareil comme un iPad, un ordinateur ou un cellulaire peut être réservé uniquement pour les tâches scolaires. Si on en a pas besoin pendant un cours donné, on le laisse à la porte dans un contenant prévu à cet effet ou dans son casier.
  • Au début du cours, tous les appareils sont éteints (en mode veille).
  • Les notifications sont désactivées en tout temps à l'école.
  • L'utilisation des appareils est permise dans certaines zones de l'école seulement.
  • Une charte est signée par les élèves en début d'année scolaire (utilisation éthique, sécuritaire et responsable dans le respect des autres personnes dans l'école).
Ces exemples sont tirés des règles d'utilisation signés par moi et ma fille en début d'année scolaire dans l'école qu'elle fréquente. Elle est dans un programme de langues internationales dans une école publique et la majorité de ses "cahiers scolaires" sont numériques.

Les temps ont changé

Encadrer, accompagner, cela implique d'abord de reconnaître que les technologies sont là pour rester. Ben oui! La transformation numérique est sur toutes les lèvres dans plusieurs sphères de la société. Les reproches à l'effet que l'école n'a pas beaucoup changé depuis un siècle sont pourtant légions. Le monde a changé. L'école doit s'adapter et devenir un reflet de la société.

Dans les médias d'aujourd'hui, je choisis surtout de retenir le texte de Marc-André Girard, directeur des services pédagogiques du Collège Durocher de Saint-Lambert, publié dans La Presse Plus. Prenez le temps de le lire au complet, mais en voici un résumé.

« Essentiellement, il s'agit de comprendre et surtout d'accepter que les technologies soient ancrées dans la vie de nos élèves et que, bien qu'il faille reconnaître les dangers de dérives, il y a néanmoins un énorme potentiel à exploiter pour enrichir autant la démarche pédagogique que celle liée à l'apprentissage. »

Dans son texte, il rappelle que les enseignants jouent un rôle de premier plan pour aider les jeunes à développer leur esprit critique, pour qu'ils apprennent à faire une utilisation réfléchie des technologies, pour qu'ils deviennent des citoyens avisés à l'ère du numérique. Bref, l'école n'a pas à être ou à devenir une cloche de verre sous laquelle les élèves sont isolés du reste du monde.

« Ce n'est donc pas en interdisant les outils qui sont pourtant utilisés et valorisés partout ailleurs dans la société que les milieux scolaires agiront de façon cohérente avec leur propre mission: éduquer les élèves et les préparer à leur vie adulte. »

Il rappelle également que, de tout temps, les adultes ont jugé « le présent à partir de [leurs] rapports au passé », en ayant une vision idyllique du passé et en se disant que c'était « donc bien mieux avant ».

J'ajouterai qu'ils ne regardent pas toujours leurs propres comportements avant de critiquer les jeunes (allô les 53% d'adultes qui consultent leur téléphone cellulaire pendant des réunions!) et qu'ils ont tendance à se donner l'absolution simplement parce qu'ils sont adultes. Ça donne à réfléchir...

La situation est complexe. Elle est composée de plusieurs sujets à considérer indépendamment. Il y a l'utilisation à des fins personnelles (divertissement, médias sociaux, jeux vidéos, etc.) et celle pour le travail scolaire ou professionnel (outils liés à la production, à la consultation, recherche et collaboration, etc.). Parfois, les univers s'entrecroisent, les compétences à développer se ressemblent. Le ministère de l'Éducation du Québec a d'ailleurs publié un cadre de référence concernant la compétence numérique ce printemps. Je pourrais aussi aborder ce qu'on appelle la dépendance aux écrans dans un autre billet.

Il faut prendre chaque aspect pour ce qu'il est et éviter de généraliser lorsqu'il est question de technologies. Il faut surtout saisir l'occasion de faire de nos jeunes de véritables citoyens du XXIe siècle, qui maîtrisent des compétences dont ils ont besoin pour prendre leur place dans la société d'aujourd'hui et de demain.