samedi 30 mars 2024

La communauté EdTech au service de l'éducation

 


Le 14 mars 2024, l'Association Edteq a organisé une soirée pour souligner la publication de deux guides importants pour la conception et l'intégration des technologies en éducation. J'ai eu l'occasion de participer de diverses façons à ce bel événement et je tenais à garder des traces ici. 

Premièrement, au cours de l'été dernier, j'avais accepté d'assumer la rédaction d'un guide pratique à l'intention des concepteurs de technologies éducatives. À partir de différentes conversations et documentations, ainsi que d'une revue de littérature, j'ai bâti le guide. Celui-ci contient :

  • des conseils pour développer des outils technologiques répondant aux besoins des milieux scolaires (du primaire à l'université), 
  • des conditions gagnantes pour intégrer le marché scolaire, 
  • des bonnes pratiques, notamment en matière de cybersécurité, d'inclusion et de sobriété numérique,
  • un regard sur des tendances à venir en éducation. 

Parallèlement, un deuxième guide à l'intention du personnel et des gestionnaires scolaires était en rédaction du côté du Centre de transfert en réussite éducative du Québec (CTREQ). J'ai assisté aux rencontres du comité de pilotage et j'ai pu suivre l'évolution du développement de ce guide. Celui-ci présente :

  • des facteurs pouvant contribuer à une intégration réussie des technologies en milieu scolaire,
  • des pistes de réflexion pour tirer profit des technologies éducatives,
  • des exemples de projets réussis.

L'idée derrière ces guides est de favoriser une utilisation à valeur ajoutée des technologies en contexte scolaire et d'accompagner, encore et toujours, les concepteurs et les utilisateurs.

La soirée du 14 mars marquait la publication des deux Guides. Ceux-ci sont maintenant disponibles gratuitement sur le site de l'Association Edteq (en format PDF). Je crois sincèrement qu'ils méritent de circuler abondamment dans les milieux. Alors, n'hésitez pas à les partager!

Deuxièmement, la soirée de lancement, organisée par l'Association Edteq, avec la participation de Desjardins Caisse des Technologies, a été une incroyable occasion de réseautage et de partage. Ce fût vraiment une réussite! Tous ceux et celles qui y ont participé sont certainement repartis énergisés (en tout cas, moi, je l'ai été!), avec la conviction qu'il faut aller de l'avant pour que les milieux éducatifs puissent tirer le meilleur de l'intégration des technologies (pas besoin de dire que je n'en doute pas!). 

J'aime particulièrement ce type de soirée qui permet de faire de nouvelles connaissances et de revoir des collaborateurs réguliers. J'aime le mélange des genres qui se produit aussi.  

Finalement, j'ai participé activement à la programmation de la soirée en intervenant dans le panel de discussion qui a permis de mettre en lumière des usages positifs et concrets de la technologie dans les écoles. Un honneur pour moi d'être aux côtés de Shawn Young, co-fondateur et président de l'Association Edteq, de Nadia Naffi, chercheure à l'Université Laval, de Federico Puebla et Cyril Cosenza, de Créativité Québec.

De cette discussion, je retiens : 

  • « On n'a certainement pas encore exploré tous les possibles de la technologie en éducation. Il faut se donner le droit de le faire pour les découvrir. »
  • « Il existe des technos conçues pour répondre à des besoins spécifiques et qui changent l'éducation en mieux! »
  • « Le marché éducatif est une drôle de "bibitte" pour les entreprises qui tentent de s'y tailler une place. Il faut savoir y naviguer et persévérer. »
  • « Les exemples d'intégration réussie de la technologie dans les écoles existent et il faut s'en inspirer pour propulser l'utilisation à un autre niveau. »
Et le mot de la fin : « Cela fait des années que l'on dit qu'il y a des choses qui doivent changer dans le monde scolaire, mais rien ne bouge. Cessons d'attendre et provoquons le changement dans nos milieux. Osons poser des gestes pour offrir une éducation moderne à nos enfants, pas pour demain, mais bien pour aujourd'hui, dès maintenant. On se met en action? »

« Osons revoir les façons d'enseigner et d'apprendre, osons évoluer dans les pratiques pédagogiques en vue d'une meilleure adéquation avec l'évolution de nos sociétés, osons encourager la découverte et l'innovation, osons accompagner la jeunesse tout en saisissant le renouveau qu'elle peut nous offrir, osons nous approprier le changement et en faire une en opportunité. »

Image prise à la fin du panel de discussion par Federico.

dimanche 24 mars 2024

Dans la boîte...

 

Le Québec fait face à de nombreux défis. Il faut transformer, optimiser, améliorer, accroître, et ce dans plusieurs domaines. Par contre, lorsque je regarde le budget dévoilé récemment et le discours qui l'accompagne, je ne découvre absolument rien qui me laisse entrevoir des changements, des façons de faire différentes qui pourraient conduire à de nouveaux résultats. 

Ce n'est pas en remettant constamment de l'argent supplémentaire dans des programmes que l'on arrivera à des résultats différents. Ce n'est pas en reproduisant constamment les « bonnes vieilles méthodes » qu'on pourra relever les défis d'aujourd'hui et de demain. 

Prenons l'éducation par exemple. Sans surprise, puisque c'est un domaine que je connais très bien. Et ça tombe bien, il s'agit d'une des deux priorités énoncées par le gouvernement. 

Un budget, ça ne dit pas tout d'une vision et d'une stratégie, c'est vrai. Mais je m'attarderai davantage au choix des mots, qui témoignent bien d'une forme d'immobilisme.

La priorité 2. se lit comme suit : « Favoriser la réussite éducative des jeunes ». Dans ce chapitre, il est abondamment question du « plan de rattrapage » pour « reprendre [...] le retard accumulé ».

La priorité 3.  se lit comme suit : « Promouvoir la réussite aux études supérieures ». La première phrase de ce chapitre est la suivante : « La diplomation aux études supérieures constitue un levier essentiel pour contrer la rareté de main-d’œuvre et favoriser le développement socioéconomique du Québec ». Plus loin, on peut aussi lire que l'on souhaite « Favoriser la diplomation pour la transition énergétique et d’autres domaines prioritaires ». 

On comprend donc que la réussite éducative implique l'obtention d'un diplôme.

Pourquoi ne pas parler de réussite scolaire dans ce cas? Ça m'agace toujours un peu quand je vois réussite éducative (et pas seulement dans le budget). Dans le fond, on cherche à diplômer des jeunes. Lorsqu'ils décrochent, on parle de décrochage scolaire, mais quand ils obtiennent leur diplôme, on parle de réussite éducative, alors que c'est une réussite scolaire, académique. Ce n'est pas parce que quelqu'un n'a pas de diplôme qu'il n'a pas eu d'éducation et donc que son éducation n'a pas été réussie.

Bref, on continue de promouvoir un seul et même chemin pour tous. Sans diplôme, point de salut. Pourtant, on sait bien que le « plafond de papier » s'effrite de plus en plus. 

De plus, les statistiques montrent que de plus en plus de jeunes quittent l'école secondaire sans diplôme. Les taux de « décrochage » sont aussi élevés aux niveaux collégial et universitaire. Que faisons-nous pour transformer l'école et y intéresser les jeunes? Il faudra un jour se mettre en action pour revoir les programmes, les méthodes, l'évaluation (ce sujet pourrait faire l'objet d'un autre billet entier!).

Ensuite, si on ne peut nier que « la diplomation aux études supérieures constitue un levier essentiel pour contrer la rareté de main-d’œuvre », il y a certainement d'autres avenues pour répondre aux besoins croissants, complexes et urgents du marché de travail, surtout dans un monde qui change rapidement et constamment (inutile de dire que les programmes scolaires ne changent pas rapidement et constamment). 

Pourquoi ne pas évoquer le nécessaire apprentissage tout au long de la vie, la formation continue, la requalification, le développement professionnel, l'acquisition de compétences à travers des activités formatrices diversifiées et engageantes? Pourquoi ne pas ouvrir la porte à la reconnaissance de parcours alternatifs? 

Pourquoi ne pas s'intéresser à d'autres manières de reconnaître les compétences? La microcertification avec des badges numériques gagne en popularité. Y aurait-il lieu de créer des certifications ou des attestations différentes qui ne passent pas par le « chemin officiel »? Pour augmenter le nombre de travailleurs qualifiés dans certains domaines. Pour accélérer la reconnaissance des compétences acquises hors du cadre scolaire habituel. Pour « rattraper » ceux qui sont sortis de l'école sans papier, mais qui ont développés des compétences. 

La pluralité des trajectoires est un fait. Pourquoi ne pas créer davantage de passerelles entre les parcours empruntés par les individus. Au final, l'important ne devrait-il pas être que tous puissent se développer professionnellement et humainement, peu importe le chemin emprunté, et que tous puissent être reconnus à leur juste valeur?

On sait déjà, depuis des décennies, que les murs de l'éducation traditionnelle s'effondrent. Le trajet uniforme avec diplôme officiel à la sortie n'est plus la seule voie depuis longtemps, mais on tarde à le reconnaître. Avec les mots employés dans le budget 2024, on persiste et signe, encore!

Il me semble que si l'on veut transformer, optimiser, améliorer, accroître, il faut regarder en dehors de la boîte. On a fait le tour de la boîte depuis longtemps!

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« Le taux de sorties sans diplôme ni qualification est en hausse un peu partout au Québec. Dans certaines régions, c'est un élève sur cinq qui quitte l'école sans aucune qualification. » (Félix Lajoie (18 mars 2024). Le Soleil)


« La demande de travail dans le secteur de la transition énergétique est en constante augmentation, notamment avec le développement de la zone d’innovation de la Vallée de la transition énergétique (VTE) ainsi que l’installation de Northvolt au Québec. 
Face à cet enjeu, le gouvernement souhaite augmenter le nombre de travailleurs qualifiés pouvant commencer rapidement à travailler dans les entreprises du secteur de la transition énergétique, particulièrement dans la filière batterie. Ainsi, il soutient les établissements dans le développement et la diffusion de programmes d’études adaptés aux besoins de main-d’œuvre. 
Dans le cadre du budget 2024-2025, le gouvernement prévoit une somme de 26,0 millions de dollars sur cinq ans afin d’accroître le nombre de diplômés dans le secteur de la transition énergétique et dans d’autres domaines prioritaires. »

Source de l'image : Publication de Catherine Mathys sur LinkedIn, au sujet d'une conférence présentée à l'événement SXSW en mars 2024.
 

samedi 2 mars 2024

Une histoire de 42 Québec


Quelque part dans le quartier Saint-Roch, à Québec, l’intérieur d’un bâtiment communément appelé « l’ancien édifice Le Soleil », fourmillent des centaines de personnes qui ont choisi d’oser pour se former autrement et vivre une expérience humaine hors du commun. Chaque jour, ils entrent dans le bâtiment et se rendent au 3ᵉ étage avec le désir de se développer professionnellement. Ils sont les maîtres de leurs apprentissages.

Ce sont des adultes (la moyenne d’âge est de 28 ans) qui ont choisi de s’engager dans un parcours de formation dont la clé du succès est leur motivation et leur capacité à persévérer. Sans horaire fixe ni échéancier de travail, chaque personne puise en elle l’autodétermination pour compléter le parcours (en moyenne, entre 12 à 18 mois). 

Chacune a une histoire différente. Un parcours unique qui l’a conduit à vouloir apprendre autrement. Le point commun est un désir de développer de nouvelles compétences pour accéder à une carrière dans l’économie du numérique. Le parcours se termine d’ailleurs par un stage en entreprise (et une offre d’emploi pour la majorité!).

Un parcours technique et humain

Le parcours de formation de 42 Québec conduit techniquement à l’apprentissage de la programmation informatique. Humainement, il permet de développer des compétences comme la collaboration, la résolution de problèmes, l’autonomie, l’adaptabilité, la communication, qui sont reconnues comme étant des compétences nécessaires dans un marché du travail en transformation. Il permet aussi de gagner en confiance, de croire en ses capacités, de connaître des succès « scolaires ». 

« Je n’étais pas bon en mathématiques, je pensais ne jamais pouvoir accéder à un programme de formation en informatique. »


« 42 m'a appris à apprendre. » 




Une pédagogie efficace


La pédagogie de 42 Québec s’appuie sur des principes comme la collaboration, l’apprentissage par projets et la rétroaction entre pairs. Des pratiques qui ont fait leur preuve comme étant efficaces. John Hattie est un chercheur bien connu dans le monde de l’éducation. À travers ses travaux, il identifie les pratiques susceptibles d’avoir un impact positif sur les apprenants. Toute stratégie ayant une taille d’effet de plus de 0,40, selon Hattie, est considérée comme efficace.


Ces stratégies sont présentes dans la pédagogie de 42 : 

Autoévaluation (1,33)

Discussion collaborative (0,82)

Apprentissage réciproque (0,74)

Rétroaction (0,70)

Apprentissage par résolution de problèmes (0,68)


Mentionnons que, dans le cas de 42, la pédagogie est vécue par des apprenants adultes, qui s’engagent volontairement dans le processus. Ce type de pédagogie ne s’applique pas à tous et toutes. 




















Et c’est d’ailleurs l’une des caractéristiques principales du campus 42. Il fait la démonstration qu’il est possible d’offrir une formation différente, de qualifier des personnes pour certains types d’emplois, sans suivre le modèle traditionnel. Il fait la démonstration qu’il n’y a pas un modèle, mais des modèles pour apprendre, se développer techniquement et humainement. 


Derrière le parcours et la pédagogie de 42, se trouve le désir d’avoir un impact social important. En permettant :

d’encourager la réalisation du plein potentiel des individus; 

de leur permettre de rester compétitif et pertinent en emploi; 

tout en assurant l’inclusivité et l’équitabilité de notre société;   

et en développant une citoyenneté informée et résiliente. 


Ce sont des principes qui guident les travaux de l’UNESCO sur l’importance de l’apprentissage tout au long de la vie.


Et ce n’est pas simplement un désir, 42 Québec y arrive, pour vrai Trois ans après l’ouverture du campus, quelque 300 personnes ont entrepris le parcours, ceux qui complètent sont de plus en plus nombreux. Les commentaires des employeurs sont élogieux. La preuve de concept a été faite.


« Le parcours de 42 est vraiment différent d’un parcours académique standard. Cela [paraît dans le profil du stagiaire] : beaucoup d’autonomie, d’ouverture aux commentaires, curieux d’en savoir plus. »



Il fallait être visionnaire pour implanter un parcours de formation qui ne ressemble à aucun autre, qui brise tous les dogmes de l’éducation. Être en dehors de la boîte demande une volonté de fer et une détermination de tous les instants. Faire de l’innovation sociale n’est pas de tout repos. 


À l’heure où plusieurs en appel à penser l’éducation autrement pour favoriser l’engagement des apprenants, où on reconsidère la reconnaissance des acquis, où on encourage la micro-certification par compétences, où le plafond de papier se fragilise, 42 Québec permet de croire qu’il est possible de donner la possibilité à un plus grand nombre de personnes de se former pour contribuer à la société d’aujourd’hui et de demain. 



Si certaines personnes de mon réseau veulent visiter, il y a des portes ouvertes le 6 mars.

La prochaine piscine est en septembre pour ceux qui voudraient tenter leur chance.


 

J’ai déjà parlé de 42 sur ce blogue : 

1, 2, 3, 42... Plongez! (8 février 2021)

42 Québec prend vie (13 mai 2022)

Briser le plafond de papier (9 octobre 2023)